samedi 10 mai 2008

L’EGLISE CATHOLIQUE DU CAMEROUN ET LA FORMATION DES PRÊTRES

INSTITUT DE PHILOSOPHIE SAINT-JOSEPH-MUKASA
Affilié à l’Université Pontificale Salésienne - Rome
B.P. 185 Yaoundé (Cameroun).




Séminaire de Philosophie Sociale et Politique l’aspect religieux et participation au développement :
Le pasteur et le développement


Par

Daniel ABADA ZENGUE
et
Romain VOUFO ZANGUE


Sous la direction de

M. Paul BIANGMOUA BINZOULI



Année Académique 2007-2008
(Premier Semestre)
INTRODUCTION


Le développement est une question qui restera toujours à l’ordre du jour des préoccupations de tout être humain et de tout groupe social. Car étant en manque ou en possession du développement, l’on recherche les voies et moyens, soit pour l’atteindre soit pour le maintenir voire l’améliorer. Le développement qui reste donc un sujet d’actualité ne laisse personne indifférent. Son besoin s’impose partout où les hommes se rassemblent même dans les communautés ecclésiales. C’est même sous cet angle qu’on pense aujourd’hui que le développement d’un groupe social ou d’une communauté peut être promu et/ou animé non plus par les pouvoirs publics uniquement comme on le pensait, mais aussi et surtout par tous les membres sociaux y compris le pasteur qui est appelé à vivre avec ses fidèles sur qui il exerce une certaine influence spirituelle.
Comment comprendre ce concept de développement qui intègre des aspects, des implications et des nécessités aussi variés ? Le pasteur, dont nous parlerons précisément dans le cadre de l’Eglise Catholique du Cameroun, n’est-il pas déjà, par sa formation diocésaine ou religieuse, préparé à assumer sa mission de guide spirituel et surtout de promoteur ou animateur du développement intégral de ses paroissiens ?
Au regard de la réalité, l’infaillibilité n’étant pas le propre de la nature humaine, n’existerait-il pas des insuffisances et quelques obstacles respectivement pendant et après la formation des prêtres qui freineraient la bonne réalisation de l’objectif secondaire de l’Eglise à savoir le bien être physique et matériel des populations ?
Telles seront les principales questions auxquelles nous essayerons de donner des réponses satisfaisantes dans le cadre de ce travail de recherches qui se détache de toute spéculation et de toute vaine réflexion.

1. LE DEVELOPPEMENT
1. 1. La notion de développement

Le développement est un concept qui a été défini différemment selon les époques et les sociétés. Certains penseurs comme Jean-Jacques Friboulet ont pensé que « le développement est un processus par lequel un pays devient capable d’accroître sa richesse de façon durable et autonome et de la repartir équitablement entre les individus »[1]. Contrairement à cette affirmation de Friboulet, et en faisant recours au philosophe camerounais Njoh-Mouéllé, fort est de constater que le développement ne saurait être basé sur l’aspect quantitatif des réalisations matérielles effectuées dans une société donnée, mais sur l’homme, en tant qu’il est un être à libérer de toutes les formes de servitude entravant son épanouissement total.
C’est dans cette perspective que François Perroux a pu dire que « le développement revient à nourrir les hommes, soigner les hommes et instruire les hommes »[2]. C’est un point de vue acceptable qui avoisine d’ailleurs la conception du développement dans le cadre de notre séminaire sur l’aspect religieux et la participation au développement. En effet, nous avons dit que le développement, qui est l’insertion d’une population donnée dans son environnement, dans son milieu passe par une transformation permanente, progressive et profonde s’opérant dans toutes les structures de la vie humaine en vue d’atteindre les conditions de vie meilleures, nécessaires à l’épanouissement de l’homme et de la communauté toute entière. C’est ce qui a fait dire à Paul VI que « le développement concerne tout l’homme et tous les hommes »[3]. Si la définition du concept de développement est si complexe, qu’en est-il de ses aspects ?

1. 2. Les Aspects du développement

Envisager le développement d’un individu ou d’une communauté consiste à améliorer au cas par cas et d’une manière progressive les structures économiques, sociales, politiques, culturelles et religieuses qui régissent la vie quotidienne de cet individu ou de cette communauté Pour cela, du point de vue social, l’accent doit être mis sur l’éducation surtout des jeunes car celle-ci est un atout primordial, l’une des clés de réussite de toute société en voie de développement. Par le fait même qu’une population instruite est apte à faire face aux exigences posées par le souci de développement tandis que des personnes analphabètes constituent un frein à tout épanouissement. Pour ce fait, instruire les jeunes est en quelque sorte construire sur le roc, mais il faut veiller à la purification des mœurs.
La purification des mœurs est un processus invitant tous et chacun des individus non seulement à la responsabilité mais aussi à laisser de coté tout ce qui n’est pas profitable à l’homme ou au groupe. Des efforts seront par exemple fait pour éradiquer la corruption, la prostitution , la déviance vestimentaire,la délinquance, la fraude et l’oisiveté qui handicapent l’ essor de toute communauté humaine.
De même, l’amélioration des infrastructures sanitaires et l’utilisation des progrès de la médecine permettant de réduire les décès et de maintenir l’homme en activité et en bonne santé sont d’un grand secours dans toute société qui se veut développer.
Du point de vue économique, le souci est d’organiser et d’augmenter la production, d’assurer la régulation des échanges, de trouver des moyens pour écouler les produits, d’accroître les revenus, d’encourager l’épargne ou l’investissement.
Dans le processus de la quête du bien-être, la politique ne doit ni être en retard, ni rester en marge de tout projet de développement. Ainsi donc, les efforts doivent être consentis pour établir la paix dans la Cité tout en encourageant l’innovation et la création des entreprises susceptibles d’employer le maximum de personnes.
Sur le plan religieux, tout est mis en œuvre pour établir des rapports non seulement entre les hommes et leur Dieu, mais aussi de bons rapports entre les hommes, rapports d’entente et de convivialité. Pour s’attendre à des rendements satisfaisants dans chacune de ces structures de la vie humaine, fort est de souligner qu’il faut des cadres expérimentés qui peuvent, chacun travaillant dans le domaine qu’il maîtrise, apporter des éléments nécessaires aux projets communs de développement. Mais ce développement exige tout au plus que certaines conditions soient remplies d’un coté par le promoteur et/ou animateur et de l’autre part par la population.

1. 3. Les exigences

Dans le processus d’amélioration des conditions de vie, la consultation des populations, dans le but de recenser les besoins qui leur sont pressants, semble être importante car lorsque la population se rend d’elle-même compte d’un manque, elle st prête à participer à la conception, à la réalisation d’un programme visant à combler ce manque sous la direction d’un expert. Il est important de souligner ici que tout projet de développement, pour une population donnée, réalisé en dehors de celle-ci n’est que perte de temps et d’argent. La population doit se sentir concernée par ce projet pour qu’elle apporte sa contribution.
La participation de la population de suffit pas. Il faut également une parfaite organisation permettant :
· de canaliser les énergies ;
· de classer les besoins suivants les priorités ;
· de choisir les moyens en fonction des possibilités ;
· de répartir les tâches suivant les compétences ;
· et d’établir enfin un budget.
Tout cela n’est possible que si les hommes formant ce groupe social sont unis, confiants les uns à l’égard des autres et solidaires pour la réalisation du projet commun de développement. De ce fait, le promoteur ou l’animateur de l’épanouissement des hommes d’une communauté doit être doté des capacités psychologique, sociologique, philosophique voire théologique pour comprendre ceux avec qui il travaille et les orienter vers les objectifs qu’ils se sont fixés tout ensemble dès le départ. Ce promoteur n’est-il pas le pasteur dont nous en reconnaissons les capacités multi dimensionnelles ?

2. LE PASTEUR : AGENT DE DEVELOPPEMENT
2. 1. Vision théorique de sa formation

Le futur pasteur, compte tenu des multiples exigences de sa mission, visant à apporter le message de Salut et l’épanouissement aux hommes, doit recevoir à la fois une formation spirituelle et humaine adéquate en vue de pouvoir répondre plus promptement aux besoins et humains des populations mis à sa charge.

2. 1. 1. La formation spirituelle

Elle est beaucoup plus orientée vers les saintes écritures, l’enseignement de l’Eglise, la tradition de l’Eglise, l’histoire de l’Eglise et la vie des saints et saintes. Ce qui permet au bénéficiaire de s’enraciner dans la foi et d’acquérir des méthodes permettant de conduire dans la foi le peuple de Dieu sur le chemin d’éternité.

2. 1. 2. La formation humaine

Si la formation spirituelle permet aux séminaristes de s’enraciner dans la foi, la formation humaine quant à elle vise à former l’homme futur prêtre dans son intégralité afin de lui permettre d’être mature, responsable et d’assoire une personnalité. Ces qualités lui permettront de réaliser plus tard les projets de l’Eglise en faveur des hommes car l’Eglise n’est pas en dehors des problèmes qui touchent les hommes, elle traite certains aspects de la vie et de la société contemporaine. D’où la nécessité qui s’impose aux pasteurs d’avoir un niveau d’étude et une culture assez élevés pour s’occuper de toutes les couches sociales. Le numéro 160 paragraphe 1 des Constitutions de l’Ordre des Frères de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont Carmel dit que, « en plus de la formation carmélitaine, nos religieux doivent recevoir une culture humaine, professionnelle, scientifique et technique qui réponde à leurs désirs légitimes et à leurs capacités, en conformité avec les programmes et les nécessités de la province et de l’Ordre, pour être à même de travailler avec une vraie compétence au service du peuple de Dieu ».
De même sur le plan moral et humain, Jean-Paul II proposera une méthode satisfaisante. Il dira que :

« aujourd’hui, plus que jamais – ont affirmé les pères synodaux – l’on aura soin de former nos futurs prêtres aux vraies valeurs culturelles de leur pays, au sens de l’honnêteté de la responsabilité et de la parole donnée. Ils seront formés de manière à revêtir les qualités de représentants du Christ, de vrais serviteurs et animateurs des communautés chrétiennes (…) de manière à être des prêtres spirituellement solides et disponibles, dévoués à la cause de l’Evangile, capables gérer avec transparence les biens de l’Eglise, de mener une vie simple en conformité avec leurs milieux »[4].

En somme, ces qualités spirituelles et humaines exigées aux futurs prêtres sont assimilées durant le processus de formation proprement dit dont nous en parlerons plus précisément dans ses aspects pratiques.

2. 2. Les Aspects pratiques de la formation

Nous passerons au peigne fin la formation des candidats au sacerdoce en nous attardant à tous les différents aspects les préparant à devenir des promoteurs et/ou des animateurs des projets de développement dans les localités où ils seront appelés à exercer ou à vivre.

2. 2. 1. la vie académique

Un prêtre doit être un intellectuel capable de tenir un discours cohérent, logique et richement argumenté car il est appelé à s’exprimer – très souvent comme une personnalité ressource d’un rang élevé – devant des personnes dont le niveau d’instruction est parfois inférieur et même supérieur au sien. C’est la raison pour laquelle il fait des études de philosophie et de théologie le rendant capable de parler simplement du langage hermétique de la Bible, livre par excellence de la Révélation Divine.
Dans ce parcours académique, il reçoit des cours et des enseignements à caractère philosophique et théologique mais aussi social.
Pour ce qui est de l’Institut de Philosophie Saint-Joseph-Mukasa situé à Nkolbisson, une banlieue à la périphérie de Yaoundé la capitale du Cameroun, les cours ayant trait à une préparation au développement pendant le cycle de trois années de philosophie peuvent être les suivants :
v En Philosophie 1,
- Logique ;
- Philosophie de l’Art et du Travail ;
- Sociologie.
- Vision Africaine du Monde : Economie et Art de vivre ;
- Vision Africaine du Monde : Symbolisme et Renouveau pédagogique en Afrique ;
v En philosophie 2,
- Pédagogie.
- Psychologie ;
- Séminaire sur l’Aspect religieux et la participation au développement ;
- Philosophie sociale et politique
v En philosophie 3,
- Philosophie du Langage.
Pour sa part, le Grand Séminaire de Philosophie et de Propédeutique Marie Reine des Apôtres situé à Otélé, petite ville située sur l’Axe-lourd Yaoundé-Douala propose une panoplie d’enseignements tels que : Savoir-vivre, Pédagogie générale, Philosophie de l’art et du Travail, Etude de Et si l’Afrique refusait le développement ? de Axelle KABOU, Logique, Introduction à la Sociologie, VAM (Symbolisme et renouveau pédagogique), VAM (Vision physique et Métaphysique en Afrique traditionnel), Philosophie de l’éducation, Psychologie Générale, Philosophie sociale et politique.
De même au sein de la Faculté de Théologie de L’Université Catholique d’Afrique Centrale, les candidats au sacerdoce reçoivent entre autre des cours les préparant à être des promoteurs et/ou agents de développement tels que :
Ø Introduction à la Théologie pastorale ;
Ø Missiologie ;
Ø Nouveaux défis de la Mission chrétienne ;
Ø Loi et Liberté dans le processus de responsabilisation en Afrique.
Ces cours que reçoivent les candidats au sacerdoce dans ces différents instituts possèdent un contenu leur permettant d’assimiler tel ou tel autre aspect du vaste et complexe concept qu’est le développement rendant aptes, une fois ordonnés d’être un tremplin – pour les groupe sociaux où ils seront appelés à exercer leur ministère ecclésial – afin d’atteindre un niveau plus amélioré d’insertion environnementale.

2. 2. 2. La vie communautaire

Tous les candidats au sacerdoce vivent dans les Scolasticats (maisons de formation pour les religieux) et les Grands Séminaires (pour les diocésains). Ils vivent ensemble comme dans une maison de famille. Au début de l’année, ils sont répartis en équipe de vie et/ou en commissions et agissent à l’intérieur de ces petits groupes pour le bon fonctionnement de leur maison. Ils sont appelés à mener des activités agricoles ou créer des initiatives personnelles en vue de participer à l’autofinancement de leur maison ou pour alléger l’économie de leur couvent. Chaque candidat assure des tâches précises et certaines responsabilités lui sont confiées par les formateurs. Au bout d’un certains temps, généralement le semestre, il y a rotation des charges et responsabilités afin que les étudiants puissent s’adapter à toutes les tâches, puissent connaître d’autres types d’activités : ceci dans le but d’être polyvalents et d’être capables de faire des suggestions dans tel ou tel autre domaine de la vie communautaire, dans le vie de groupe et bien plus dans la vie en société.
Puisqu’ils sont appelés dans l’Eglise en vue de devenir des prêtres, ministres de Jésus-Christ pour le Peuple de Dieu, les candidats exercent aussi des activités apostoliques.

2. 2. 3. La vie apostolique

Pendant l’année académique et cela dans certaines maisons de formation, les futurs prêtres sont tenus de s’occuper de certains groupes de chrétiens dont la variété et la diversité fluctuent en fonction des lieux, villes ou paroisses. C’est ainsi qu’on peut citer des groupes comme :
La Jeunesse Estudiantine chrétienne (JEC) ;
Les Enfants de Chœur ;
Les Amis de Sainte Thérèse ;
Les Jeunes Donum Dei ;
Le Mouvement Eucharistique des Jeunes (MEJ).
et bien d’autres qui sont autant de divers en spiritualité.
Les candidats au sacerdoce s’occupant de ces groupes veillent sur le bien-être spirituel de chaque membre, accompagne le groupe dans ses activités sociales ou d’apostolat et surtout, à travers des échanges verbaux et personnels, proposent des solutions contribuant à l’amélioration des conditions de vie des différents membres.
Chez les Diocésains, avant de faire des études de philosophie, le séminariste est envoyé en pré-stage auprès d’un Abbé (prêtre diocésain) pour le suivre pendant une certaine période.
Pour ce qui est des religieux de l’Ordre des Frères de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont-Carmel, disons que lorsque les trois années de philosophie sont achevées, le frères est envoyé en stage pastoral où il vit pendant une année entière avec une communauté paroissiale. Pendant ce moment, il fait une observation rapprochée et précise de la vie des différents paroissiens et les côtoient régulièrement ; ce qui lui permettra à la fin de cette année et pendant ses études de théologie de trois ans de réfléchir sur la vie de ses futurs paroissiens et sur les éventuelles améliorations qui doivent y être apportées et surtout sur les différentes méthodes.
Ainsi préparés à sa mission de pasteur d’âme et de « pasteur de corps », le candidat au sacerdoce se trouve armé pour mener à bien sa mission de Prêtre de Jésus-Christ selon l’ordre du Roi Melchisédech.
Sur un plan plus pratique et général, les religieux, à la différence des diocésains, appartiennent à des Congrégations ou des Instituts de vie religieuse qui montrent leur spécificité à travers leur spiritualité ou charisme. Le mot « charisme » pouvant renvoyer à une activité particulière dans l’Eglise. Ici, le prêtre religieux exerce une action précise en plus de sa mission d’évangélisateur, une action qui souvent rejoint sa mission ou se rapproche d’elle. C’est ainsi que l’on a des congrégations :
Oeuvrant dans le domaine sanitaire comme :
Ø La Congrégation des Frères Hospitaliers ;
Ø La Congrégation des Sœurs Hospitalières du Sacré Cœur de Jésus qui s’occupent des malades mentaux ;
Ø La Congrégation des Sœurs Carmélites Thérésiennes Missionnaires.
Oeuvrant dans l’assistance aux pauvres ou personnes abandonnées dans les agglomérations comme :
Ø La Congrégation des Filles de la Charité (branche féminine de la Congrégation de la Mission ou des Prêtres de Saint Vincent de Paul) ;
Ø La Congrégation des Missionnaires de la Charité.
Oeuvrant dans l’enseignement comme
Ø La Congrégation des Fils de l’Immaculée Conception (Conceptionnistes) pour l’enseignement secondaire ;
Ø La Société de Jésus (Jésuites) pour l’enseignement supérieur.
Oeuvrant dans tous les domaines et surtout en fonction des besoins du Peuple de Dieu comme l’Ordre des Frères Carmes (qui sont plus spirituels).
Dans ces Instituts de vie religieuse, la recherche des candidats ne se fait pas comme dans les diocèses qui recrutent leurs candidats en principe dans les petits Séminaires. Elle se fait très souvent en fonction du charisme de la Congrégation et surtout en présentant les objectifs de l’Institut au candidat. Ce dernier ne se consacrera sa vie pour le Christ dans cet Institut que s’il a des prédispositions ou des grâces particulières lui permettant de s’y engager définitivement. Car il est admis que si le Seigneur Jésus-Christ appelle son serviteur, il le comble des grâces permettant à ce dernier de répondre à son appel et précisément dans tel ou tel autre Institut.
Au terme de leur formation, les prêtres diocésains d’une part et les prêtres religieux auront accompli des années de formation relativement réparties comme suit :

Diocésains
Religieux
une année de pré-stage
Une année de postulat (prénoviciat)
Trois années de philosophie
Une année de Noviciat
Trois années de théologie
Trois années de philosophie
Une année de Diaconat
Trois années de théologie

Une année de Diaconat

A cette différence d’années de formation s’ajoute l’aptitude non négligeable à être ou non promoteur et/ou agent de développement. Cette aptitude varie selon qu’on est prêtre diocésain ou religieux et même entre les religieux car les diocésains ont la possibilité, dans leur style de vie de solitaire et libres de toute contrainte directe, de mener des activités que les religieux ne pourraient pas à cause du scrupuleux respect du vœu d’obéissance qui astreint ces derniers à un spectre d’action très réduit. De plus, entre les religieux, la possibilité d’entreprendre, de promouvoir ou d’animer des projets de développement est étroitement lié à la mise en application du charisme ou de la Spiritualité dudit Institut. Dans cette optique, il sera difficile voire impossible de rencontrer un religieux Conceptionniste exerçant au sein d’une structure hospitalière. De ce fait, le religieux doit coûte que coûte n’agir qu’en fonction du charisme. Si son Institut de vie religieuse est à vocation cloîtrée comme c’est le cas de plusieurs congrégations féminines, il sera impossible de voir le religieux ou la religieuse entreprendre des activités ou des projets de développement.
Sur un tout autre plan, on a observé l’absence des structures de développement ou plutôt la présence des manifestions du sous-développement dans certaines communautés ou groupes sociaux dans lesquels le pasteur est présent ; ce qui nous pousse à rechercher les obstacles au développement et surtout les sources de ces obstacles sachant qu’elles peuvent venir soit des populations elles-mêmes, soit du pasteur.

3. EVALUATION DE LA FORMATION DU PRÊTRE

Les prêtres formés dans les Grands Séminaires et les Scolasticats sont, dans les objectifs de l’Eglise, aptes à promouvoir ou à animer des projets/actions de développement là où ils seront appelés à exercer leur ministère d’évangélisation. Aucune prévision humaine comme toute action humaine n’étant pas parfaite, il va sans dire que ces objectifs de l’Eglise ne seront pas toujours atteints. C’est ici le lieu d’envisager d’une part la possibilité d’existence de quelques insuffisances résultant de la formation des prêtres. D’autres parts, face à la réalité, l’on pourrait aussi remarquer la présence de quelques obstacles aux actions de développement dans certaines localités ou paroisses. Il n’en demeure pas moins vrai que malgré ces insuffisances et ces obstacles, l’Eglise, faite d’hommes, tende toujours vers la perfection et reste ouverte aux propositions dans le but d’améliorer ses méthodes et réaliser parfaitement son objectif de bien-être spirituel et non-spirituel des populations à sa charge.

3. 1. Les insuffisances

Celles-ci relèvent précisément du domaine académique car à bien observer, l’on notera le grand nombre de cours de philosophie et de théologie et juste une poignée de cours sur le développement social, sur le développement des populations ou sur l’analyse des conditions de vie des hommes et surtout les éventuelles améliorations à y apporter. L’on notera aussi une certaine superficialité dans la dispense de ces cours qui n’abordent pas les problèmes concrets des hommes en fonction de leurs milieux de vie. Ces insuffisances pendant la formation seraient négligeables si l’on omet le manque alarmant de spécialistes ou d’experts en matière de développement des groupes sociaux qui pourraient dispenser ces cours dans les différents instituts de philosophie et dans les facultés de théologie.

3. 2. Les obstacles

Les freins à la conception, à l’établissement ou à l’animation des projets de développement se trouvent à deux grands niveaux, chez les prêtres eux-mêmes.
Chez les prêtres religieux – obéissant à un charisme particulier – la difficulté se trouve au niveau de l’action de développement à susciter ou même à réaliser. Ici, le religieux reçoit de son supérieur l’interdiction formelle d’entreprendre une activité qui ne va pas en droite ligne avec le charisme ou la spiritualité de leur Congrégation. Evoquons ici le cas ces religieuses qui n’avaient pas voulu participer à la construction et au fonctionnement d’une école primaire d’abord et d’une maternité ensuite dans ce village africain[5]. nous pouvons aussi citer le cas de la petite indienne d’origine yougoslave Agnès Gonxha BOJAXHIU, née à Skopje en 1910 plus connue sous le nom de Mère Teresa. Elle était religieuse dans la Congrégation des Filles de Lorette qui ne fait aucune action de développement que ce soit. Ressentant en elle le besoin de s’occuper des pauvres, des miséreux, des abandonnés et des « laissés-pour-compte » de notre société moderne, elle était obligée de quitter sa congrégation afin de fonder une nouvelle congrégation selon le charisme que lui avait inspiré l’Esprit Saint. Elle créa donc la Congrégation des Missionnaires de la Charité qui est aujourd’hui répandue dans le monde et qui excelle dans cet apostolat.
La personnalité du prêtre est aussi à prendre en considération car humain qu’il est, il peut avoir « le désir exclusif du profit et la soif du pouvoir, liés l’un à l’autre »[6] et dont sont sujets la plupart des hommes y compris certains clercs. Il y aurait pour ce cas une inadéquation entre leurs actions et leur formation, inadéquation qui rejoins la dualité « corps-esprit » relevée par Jésus-Christ lorsqu’il dit : « L’esprit est ardent mais la chair est faible » (Matthieu 26,41b)[7].

3. 3. Les propositions

L’Eglise ne cesse de réfléchir sur les moyens et méthodes en vue d’améliorer les conditions de vie des populations à sa charge. Pour que se réalisent ses ambitions et projets il faudra donc qu’elle inculque à ses prêtres pendant leur formation le respect du bien commun et le culte de l’excellence. Elle insistera sur le sens du de la responsabilité et suscitera en eux l’esprit de coresponsabilité. En développant en ces derniers un sens élevé à la responsabilité, elle pourra aussi atténuer l’observance stricte des vœux dans certaines circonstances afin de permettre aux prêtres d’être plus disponibles à œuvrer librement pour le bien-être spirituel et non-spirituel de ceux dont ils ont la charge dans l’exercice de leur ministère.

CONCLUSION

Au terme de ce travail de recherches, nous aurons vu que le développement, avec ses multiples exigences implique aussi le pasteur qui, au cours de ses années de formation, reçoit des connaissances et vit des expériences lui permettant, une fois ordonné, d’assurer valablement sa mission de guide spirituel et surtout de promoteur/animateur du développement intégral de ses paroissiens.
Face à des insuffisances notées pendant la formation des prêtres et face à des obstacles rencontrés sur le terrain, l’Eglise Catholique qui arrive quand même à réaliser certains projets de développement dans ses paroisses, doit encore réfléchir sur certaines questions concernant la formation et la vie de ses prêtres.
Elle devra insister sur les vertus que les prêtres doivent pratiquer dans leur vie et pendant l’exercice de leur ministère apostolique comme le culte de l’excellence, la responsabilité – coresponsabilité. Dans le but de trouver les solutions pratiques sur toutes les questions (ponctuelles ou permanentes) qui la concernent dans tous les aspects de sa vie, l’Eglise et ses chefs – les évêques en collaboration avec les cardinaux – organisent des conciles, des synodes à la dimension de tout le globe ou dans les différents continents.

LEXIQUE
Abbé : nom donné tout prêtre dans l’Eglise catholique.
Apostolat : activité dans laquelle on s'investit corps et âme ou encore attitude missionnaire visant à propager une foi religieuse.
Charisme : don particulier conféré par la grâce divine.
Congrégation : Compagnie ou communauté de prêtres, de religieux ou de religieuses.
Curé : prêtre placé à la tête d’une paroisse.
Diocèse : circonscription ecclésiastique placée sous la juridiction d’un évêque ou d’un archevêque.
Eglise : ensemble de personnes qui ont en commun une même doctrine ou façon de penser, par extension, édifice destiné à l'exercice du culte chrétien.
Fidèle : personne qui professe une religion.
Grand Séminaire ou Séminaire : établissement religieux où étudient et se préparent les jeunes clercs qui doivent recevoir les ordres.
Novice : personne qui, en vue d’appartenir intégralement à une congrégation religieuse passe un temps d’épreuve dans un couvent imposé par la Règle de cette congrégation, temps au terme duquel elle est admise à professer ses vœux.
Noviciat : temps (une année ou deux) d’épreuve que la Règle d’une congrégation religieuse impose aux novices avant leur profession (leur première profession ou profession temporaire). Par extension, lieu ou édifice où ce temps est passé.
Ordre : Dans le langage de l’Eglise, c’est une association de personnes vivant dans l’état religieux après avoir fait des vœux solennels. Par extension, on peut désigner toute communauté religieuse.
Paroisse : circonscription ecclésiastique où s’exerce le ministère d’un curé ou d’un pasteur.
Petit séminaire : école secondaire catholique fréquenté par des élèves qui ne se destinent pas nécessairement au sacerdoce.
Sacerdoce : état ou dignité du ministre des dieux ou de Dieu. Ministère du pape et des évêques (sacerdoce de premier rang), et par extension, des simples prêtres (sacerdoce du second rang).
Spiritualité : ensemble des croyances, des exercices qui concernent la vie spirituelle ; forme particulière que prennent ces croyances et ces pratiques.
Vicaire : celui qui exerce, en second, les fonctions attachées à un office ecclésiastique.
Vocation : appel de Dieu touchant une personne, un peuple, afin qu’il vienne à Lui.
Vœu : engagement pris soi-même, fait librement à Dieu et prononcé par un homme ou une femme avant son entrée en religion c’est-à-dire dans une congrégation religieuse.
BIBLIOGRAPHIE


v Abel NSOLO, Libérer l’Amour. Vœux de chasteté et d’obéissance, Kinshasa, Baobab, 2005, 47p.
v François PERROUX, « Le développement », in Encyclopedia Universali, version 10
v Jean-Jacques FRIBOULET, « Le développement », in Encyclopedia Universalis, version 10.
v Jean-Paul II, L’Eglise en Afrique. Exhortation Apostolique post-synodale. Ecclesia in Africa, Paris, Cerf, 1995, XI – 134p.
v Paul VI, Populorum progressio, Paris, Centurion, 1967, 125p.
v Philippe LAURENT, « Le développement des peuples, vingt ans après » in Etudes, Tome 368, n° 4 (avril 1998).
v Traduction Œcuménique de la Bible (TOB), nouvelle édition revue, Paris, Alliance Biblique Universelle – Le Cerf, 1988, 1819p.


TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION.. 1
1. LE DEVELOPPEMENT.. 2
1. 1. La notion de développement 2
1. 2. Les aspects du développement 2
1. 3. Les exigences. 3
2. LE PASTEUR : AGENT DE DEVELOPPEMENT.. 5
2. 1. Vision théorique de sa formation. 5
2. 1. 1. La formation spirituelle. 5
2. 1. 2. La formation humaine. 5
2. 2. Les Aspects pratiques de la formation. 6
2. 2. 1. la vie académique. 6
2. 2. 2. La vie communautaire. 8
2. 2. 3. La vie apostolique. 8
3. EVALUATION DE LA FORMATION DU PRÊTRE.. 12
3. 1. Les insuffisances. 12
3. 2. Les obstacles. 12
3. 3. Les propositions. 13
CONCLUSION.. 14
LEXIQUE.. 15
BIBLIOGRAPHIE.. 16
TABLE DES MATIERES. 17

[1] Jean-Jacques FRIBOULET, « Le développement », in Encyclopedia Universalis, version 10.
[2] François PERROUX, Ibidem.
[3] Paul VI, Populorum progressio, Paris, Centurion, 1967.
[4] Jean-Paul II, L’Eglise en Afrique. Exhortation Apostolique post-synodale. Ecclesia in Africa, Paris, Cerf, 1995, XI – 134p.
[5] Cf. Abel NSOLO, Libérer l’Amour. Vœux de chasteté et d’obéissance, Kinshasa, Baobab, 2005, pp. 7-8.
[6] Philippe LAURENT, « Le développement des peuples, vingt ans après » in Etudes, Tome 368, n° 4 (avril 1998), pp. 459-462.
[7] Traduction Œcuménique de la Bible (TOB), nouvelle édition revue, Paris, Alliance Biblique Universelle – Le Cerf, 1988, p.1432.

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